Back to the feedback !

Ce billet est inspiré d'un conversation récente avec une amie qui travaille dans une entreprise dans laquelle un système de feedback remontant est un cours de déploiement.

Elle évoquait son inquiétude et le profond désarroi dans lequel l'idée de devoir évaluer son chef de service la plonge.

Et ses questions : à quoi ce feedback va-t-il servir ? Quels risques de représailles pour un feedback négatif, voire sincère... ?

La mise en place d'un feedback remontant est une préconisation fréquente pour une entreprise connaissant une crise de management révélant une culture en décalage avec les attentes des salariés.


Nous allons voir les conditions et moyens de rendre cet outil efficace, mais aussi ses limites.

Un feedback ? Quel feedback ?

En analyse transactionnelle, le feedback est évalué selon deux axes :

  • est-il positif ou négatif ?
  • est-il conditionnel ou inconditionnel ?
La dimension positif-négatif n'appelle pas de commentaire particulier sauf à insister sur ce caractère nécessairement clair et direct du langage utilisé. Pour tout manager qui souhaite progresser sur ce point, l'ironie ou même l'euphémisme n'ont pas leur place. La justesse du propos est ici recherchée.

Le feedback conditionnel est spécifique. Il s'agit d'une appréciation factuelle des éléments observables d'une situation, d'un travail, d'une performance. Le feedback inconditionnel, lui porte sur la personne dans son ensemble, c'est un jugement.

Sur le plan managérial, le feedback sera très essentiellement conditionnel. Sa principale fonction est, pour celui ou celle qui le reçoit, d'apprendre, de progresser, de se développer. Il a aussi pour effet d'augmenter la part d'explicite et donc de réduire l'implicite dans le discours managérial. Il apporte connaissance et reconnaissance.

Le feedback conditionnel, positif ou négatif, renforce les compétences et permet à la personne de situer son action au regard des attentes. La confiance se développe.

Le feedback inconditionnel positif est à manier avec précaution. A titre d'exemple, dire, comme j'ai pu l'entendre, à un collaborateur embauché quelques semaines auparavant qu'il est "génial" peut interroger. Quel est l'apport managérial d'une telle remarque ? En revanche, dans le cadre d'une relation de confiance profonde forgée par les années de travail en commun, cette même remarque peut avoir toute sa place.

Attention ! Le feedback inconditionnel négatif (ex : tu es nul !) est proscrit.

Le feedback asymétrique : l'enjeu de la confiance

Dans nombre d'organisations, il est préconiser de développer le feedback en ne le limitant pas au seul retour du manager envers son collaborateur.

Cela peut porter différents noms mais le principe reste le même : ouvrir les canaux du feedback entre pairs et/ou remontant. Je m'attarderai sur ce dernier.

Ainsi, le chemin du feedback remontant croise celui du lien hiérarchique.

Imaginez. Vous êtes collaborateur dans une entreprise et, avec plus ou moins de préparation, on vous demande "d'évaluer...", de "donner un avis...", de "juger..." votre supérieur hiérarchique, bref, votre N+1. Evidemment, il vous est proposer de remplir un questionnaire en ligne à cet effet, facultatif d'abord, obligatoire à terme.

Comment se positionner ? Comment savoir ce que deviendra ce feedback ? Quid de l'anonymat ? Y-a-t-il un risque de représailles ? La sincérité a-t-elle sa place dans ce processus ? Quel impact aura l'état de la relation actuelle sur le retour, son traitement, ses suites ?

Au final, la question qui est posée ici est celle de la confiance. Faire un feedback sincère, constructif, surtout à son manager, et quelle qu'en soit la teneur, c'est d'abord est avant tout lui faire confiance, confiance dans sa qualité d'écoute, confiance aussi dans sa capacité à faire la part des choses entre le message et le messager.

Or, bien souvent, l'outil va être plaqué dans un premier temps comme gage de bonne volonté oubliant que le feedback est bien plus une culture qu'un outil.

Ainsi, si donner du feedback s'apprend, en recevoir aussi. Remercier une personne qui vous fait un feedback rude mais étayé est un talent rare qui peut devenir une compétence. Il en est de même quand un manager propose à son collaborateur de lui faire un feedback. Ce manager est-il prêt à recevoir un refus ?

Le tout repose sur une qualité : l'humilité.

Ce n'est qu'avec le temps que cette culture prendra place.

Ne disparaît vraiment que ce qui est remplacé.

Le feedback se demande, il ne se donne pas.

Ainsi, on se trouve dans une contradiction apparente. 

Le feedback est utilisé pour augmenter la confiance dans l'organisation alors que pour avoir un feedback efficace, la confiance est un préalable.

Confiance => feedback et feedback => confiance

C'est sans doute une boucle positive mais comment l'amorcer ?

C'est la source d'une grande incompréhension. Ainsi, développer la culture du feedback est une attente fréquente mais, au fond, que cela signifie-t-il ?

Cela signifie le développement de la capacité à demander du feedback pour soi-même, l'habitude, pour chaque membre de l'organisation, de solliciter un retour sur son travail, ses attitudes, aussi bien à ses supérieurs, ses pairs qu'à ses collaborateurs et en toute occasion (réunion, présentation, rdv client, etc).

Peu-à-peu, et alors que les feedbacks seront pris en compte et les améliorations visibles, la culture du retour et les discussions qu'elle amène se développera.

On n'est pas sincère et constructif la première fois. Le temps d'adaptation peut être long mais avec ténacité, exemplarité, courage, humilité, clémence et sachant que tous les managers ne suivront pas, que tous les collaborateurs ne seront pas à l'aise, la direction de l'entreprise peut conduire ce changement de culture à bon port.

Donner et recevoir un feedback s'apprend et le mieux est d'apprendre ensemble.


"Un feedback est un cadeau."


Thierry Cammarata

ⵣ arbitrium14
Tel : +33(0)768871589

Mail : thierry@arbitrium14.fr

LinkedIn : Thierry Cammarata - arbitrium14

Image par athree23 de Pixabay 

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