Zéro, un, l'infini
Les longues soirées d'été sont par fois l'occasion de lever les yeux vers de ciel et d'admirer l'infini des étoiles qui scintillent et de l'espace qui les sépare.
Pour les personnes qui ont le goût de cette tranquillité réflexive, certaines questions vertigineuses peuvent alors émerger.
En chinois, il existe plusieurs manières de traduire ce que nous appelons l'infini. Certaines évoquent l'idée de ce qui n'a pas de bord ou de limite, d'autres s'attache à l'idée de plein, de débordement, de partout.
En coaching, la question de la relation à soi et aux autres, ou au monde, est un enjeu fréquent. Selon les personnes ou les contextes, certaines vont privilégier l'un ou l'autre.
Ce billet s'adresse à toutes celles et ceux qui accompagnent leurs semblables.
Des infinis de même taille
Un après-midi où je ne faisais rien, j'errais sur les internets et je suis tombé (presque) par hasard sur une vidéo consacrée aux mathématiques et notamment à la question de savoir si un infini peut être plus grand ou plus petit qu'un autre !
Je suis sorti de ma torpeur à l'écoute de la phrase suivante :
Il y a autant de nombre entre 0 et 1 qu'entre 1 et l'infini.
Je me sentais prêt à le croire mais il me manquait l'idée d'une démonstration, quelque chose qui me permette de le conceptualiser simplement.
Après quelques recherches, émerge rapidement l'idée que pour tout nombre de votre choix N, plus grand ou égal à 1 (faites vous plaisir, choisissez en un joli), il existe un nombre 1/N qui sera nécessairement compris entre entre 0 et 1, et inversement.
Mais comment matérialiser l'infini ?
Je vous propose de prendre un objet quotidien, peut-être plus encore en période de vacances, un jeu de 52 cartes.
S'il est neuf, battre les cartes d'abord 7 fois au moins, il sera alors bien mélangé.
Combien existe-t-il d'ordres différents de cartes ? Est-il possible d'avoir deux tirages identiques ?
Pour la première question, le principe du calcul de la réponse est assez simple. Prenez un jeu et tirer la première carte, elle peut être n'importe laquelle (52 possibilités). La seconde sera n'importe laquelle des 51 cartes restantes (x 51), et ainsi de suite.
Cela s'écrit très simplement 52! (52 factoriel).
La somme de toutes les combinaisons possibles est donc égale à :
52! = 52 x 51 x 50 x 49 x ... x 3 x 2 x 1 =
Ce calcul a pour résultat :
80 658 175 170 943 878 571 660 636 856 403 766 975 289 505 440 883 277 824 000 000 000 000
C'est grand ? Oui, c'est grand. Infini ? Non, loin de là, mais ceci en donne une idée.
Par exemple, si on voulait faire toutes les combinaisons, je donnerai un jeu de carte à chaque humain.
Si 8 milliards d'humains mélangent le jeu 1 fois par seconde pendant un milliard de secondes (soit env. 32 ans), nous aurons fait 8 x 10^18 combinaisons.
Si on le fait pendant 32 milliards d'années, on arrive péniblement à 8 x 10^27, il restera encore 40 zéros à faire... La bonne volonté ne suffira pas.
À titre d'ordre de grandeur, le nombre d'atome dans l'univers est estimé à 10^80.
Un jeu de carte est certainement l'objet du quotidien qui nous donne le mieux et le plus simplement l'idée d'un infini de façon aussi tangible ou palpable.
Ceci répond à la deuxième question : y a-t-il déjà eu dans l'histoire humaine deux tirages identiques ?
Oui et non.
Oui, c'est possible. Non, c'est hautement improbable.
La loi des petits nombres
Le 1, c'est le cas unique dans toute son unicité. La personne, l'événement, par nature incomparables.
L'infini, c'est la loi les grands nombres, l'histoire de comment tout finira. Pile ou face ? 50-50 à la fin, surtout qu'il n'y en a pas.
Au milieu, nous. Nous ne pouvons nous résoudre à l'unicité de tous et de tout, et l'infini nous est inaccessible. Nous avons besoin d'un intermédiaire, d'un lien fini entre tous ces uniques, un sens, un schéma, une histoire.
Ces structures (10 tirages face de suite par exemple) existent d'une part et nous avons besoin de les voir d'autre part, quitte à les inventer, comme les complotistes, qui les chérissent, ou les personnes simplement enfermées dans leur histoire ou leurs croyances.
Avec une pièce de monnaie, sur un grand nombre de tirages, pile et face ne sortiront que rarement en parfaite alternance. L'un pendra de l'avance avant que l'autre ne le rattrape, le dépasse parfois, puis ils resteront proches un moment avant que l'un se détache à nouveau et ainsi de suite.
Tout ceci forme des structures, des patterns, qui n'ont pas de sens au niveau 1 ou ∞ mais qui pour nous sont de la plus grande importance car c'est avec elles que nous vivons, pensons, sentons, décidons.
Souvenons-nous que pour les Chinois, ce que nous appelons hasard et qui n'est donc relier à rien, est traduit pas des termes qui évoquent tous le lien, le couplage. Un couplage avec quoi ? Ces fameuses structures qui déterminent dans nos vies la qualité du moment.
Stratégie de coaching
Ce type de notion n'a de sens que pour les personnes qui s'en saisissent. Et il est bien illusoire de chercher à imaginer ce que les personnes accompagnées vont en faire.
Mon cadre d'emploi de cet outil est le cas d'une personne qui oppose fortement monde intérieur et extérieur.
Toujours sur le ton de l'hypothèse ou de la proposition, j'ai, jusqu'à présent et depuis quelques mois, eu plusieurs types de retour, notamment sur les positions absolutistes (tout, rien, toujours, jamais, parfait).
Dans le cas du perfectionnisme, les personnes souvent se projettent dans le futur avec l'idée de calculer tous les coups possibles. Elles cherchent à se rassurer en trouver celui qui va se produire, comme si elles voulaient connaître les 5 premières cartes après le prochain mélange.
Possible, mais très peu probable. Elles se rassurent avec la fois avec ce qui fonctionné ou en réécrivant le passé jugeant le dernier tirage comme le seul qui pouvait advenir et que donc elles auraient dû le deviner avant.
Explorer l'idée d'infini, et sa masse incommensurable d'informations à traiter, peut libérer la pensée et orienter le coaché vers d'autres approches.
Entre zéro, un et infini, de l'événement unique, la loi des grands nombres, apparaissent des structures contingentes. La loi des petits nombres ? Elles peuvent être familières, fruit d'une volonté ou de hasards. Seules à la portée de nos sens et de nos capacités, nous leur donnons signification, elles alimentent nos histoires, notre histoire.
Est-ce efficace ?
Oui et non.
Oui, c'est probable. Non, pas à chaque fois.
* * *
Il existe bien d'autres notions mathématiques ou physiques pouvant venir éclairer une façon de penser, une croyance. Tout ceci se dit souvent fondé sur la logique et il peut être opportun, pour refaire circuler les énergies, de partir de cette même logique qui produit du vrai, mais incroyable.
Le coaching trouve ici son rôle. Les infinis, interne ou externe, sont bien trop vastes pour être connus parfaitement. En revanche, ils obéissent malgré tout à des lois, et nous pouvons observer, avec la coaché, leurs interactions, leurs structures.
L'infini, dont le centre est partout, et la circonférence nulle part.
(Citation dont la recherche de l'origine même confronte au vertige)
Thierry Cammarata
ⵣ arbitrium14
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La voie lactée - Image par WikiImages de Pixabay