Management infantilisé

En ce début d'année, notre manager entre dans le bureau de son N+1. Il a rendez-vous depuis plusieurs jours avec lui pour évoquer les premiers mois de sa prise de poste.

Pour préparer cet entretien, qu'il redoute un peu, il a rassemblé l'essentiel de ses étonnements, de ses premières actions et de ses observations sur chacun des cinq membres de son équipe, équipe qu'il a réuni quelques jours auparavant pour faire, lui aussi, un premier point de ces premiers mois avec eux et voir comment ils envisagent la suite.  Pour lui-même, il a fait ce travail. Il a contacté Mme Untel, qui est en congé maternité et qu'il n'a pas encore rencontrée. Elle lui a dit être très heureuse à l'idée de reprendre prochainement.

C'est avec tous ces différents éléments en tête qu'il s'assoit. Il est prêt.




- Comment vas-tu ?
- Bien, bonne année.
- Oui, bonne année à toi. Ok, si je t'ai demandé de venir me voir c'est pour parler de ton équipe. Comment tu la trouves ?
- Bien, pleine d'énergie.
- Bien... Enfin, on va pas se mentir. Elle est moyenne, ça progresse tout doux mais on y est pas et ça c'est ton job. Y en a deux qui ne savent toujours pas se tenir avec les clients, deux autres manquent de compétences et il y a le cas de Mme Untel...
- Je l'ai appelée. Elle est heureuse de revenir.
- Je connais ce genre de situation, tu sais.
- J'imagine...
- Oui, elle reprend prochainement mais l'équipe fonctionne sans elle, non ? Et puis on sait bien qu'elle va maintenant avoir "d'autres priorités"... j'attends de toi que vous tu t'occupes de ça. Un bon manager est un manager qui sait prendre des décisions difficiles.*

Que dire ? Que faire ?


Si vous étiez ce manager, que diriez-vous à votre N+1 ? A l'équipe ? Et que feriez vous ? 

Peut-être avez-vous déjà connu une situation similaire. Qu'avez-vous dit, fait alors ? Que diriez, feriez-vous aujourd'hui ?


Dans cet échange, le N+1 fait-il passer un test d'obéissance à son manager ? A-t-il un agenda caché ?

Le manager doit-il comprendre qu'il doit licencier cette femme à son retour de congé maternité ? De deux choses, l'une : soit cela ne lui pose pas de problème et il la licencie, soit cela lui pose un problème (moral, éthique, de valeurs) et il doit en faire son affaire et obéir. Dans le cas contraire, que se passera-t-il ?

Toutes ces questions montrent les conditions nécessaire à une bonne ambiance de travail, telles que la clarté et le reconnaissance, ne sont pas remplies.


Un enfant, je vous dis...

Il est évidement que si ce N+1 agit de la même façon avec tous ses managers, en se posant de façon normative et intrusive dans l'action de ses subordonnés, il va naturellement sélectionner celles et ceux qui sont capables d'agir à long terme avec ce type d'injonctions, donc avec un profil plutôt soumis et intériorisant la contrainte. Les autres profils, ayant plus d’appétence pour l'assertivité, la prise de risque ou de responsabilité, ne seront pas retenus ou vont partir. 

Et ceci répond à la question, posée dans mon billet de blog précédent, au sujet de savoir comment une structure peut recruter, sélectionner et conserver ce type de profil enfantin en son sein.

J'ai connu ce genre de N+1. J'en ai rencontré plusieurs dans les occasions informelles. Ils se plaignent souvent du manque d'initiative et de créativité de leurs managers et de devoir toujours impulser les actions...
Le management de proximité doit sans doute être amélioré à condition de ne pas être, lui-même, soumis à la contradiction entre la réalité qu'il perçoit et le discours qu'il doit incarner.


Nous sommes à la fin de ce troisième rendez-vous. J'ai hâte de vous retrouver pour la suite de cette conversation. Et d'ici-là, portez-vous bien.

*Cette conversation est inspirée d'un cas réel.


Thierry Cammarata

arbitrium14
Tel : +33(0)768871589

Mail : thierry@arbitrium14.fr

LinkedIn : Thierry Cammarata - arbitrium14

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